Viktor Lazlo dans SOIRMAG interview :
Le temps file mais donne bonne mine à Viktor Lazlo. La belle était un peu au bois dormant depuis 10 ans. Elle avait laissé la chanson pour la télé, notamment au côté du commissaire "Navarro". Elle a joué au théâtre et au cinéma (cf la page dédiée ICI). Elle achève son 4ème roman *.
Elle a surtout illuminé la scène avec son très beau spectacle consacré à la vie de Billlie Holiday (180 dates de 2011 à 2017). Il y a trente ans, elle présentait l'Eurovision à Bruxelles dans un fourreau noir, voix bien roulée et diamants dans les yeux.
Aujourd'hui Viktor fait résonner sa maturité.
Qu'évoque pour vous le mot "femme", un mot si important aujourd'hui, qui cache parfois tant d'épreuves ? C'est un long chemin pour devenir une femme. La phrase de Simone de Beauvoir n'est pas vaine : "On ne nait pas femme, on le devient". Pour moi, ce fut une longue route semée d'embûches, avec quelques accidents de parcours. J'ai fait l'apprentissage du bien-être et j'ai appris la condition féminine. Je suis enfin en paix avec mon être intime. Je me sens plus épanouie qu'à vingt ans. J'ai appris à me connaitre et à m'accepter. J'ai acquis une forme de distance mêlée de réalisme. Et puis je prends exemple sur Billie Holiday, qui a été une victime de son époque mais qui a aussi opposé une formidable résistance ; pour moi, c'est une leçon de vie. Ce fut une bénédiction de la jouer sur scène.
Onze nouvelles chansons, des reprises, une ambiance ouatée, des thèmes forts comme votre fils, les attentats, votre vie à Bruxelles à vos débuts, et puis l'amour : c'est une déclaration !
J'ai écrit les textes spontanément Les paroles se sont imposées naturellement, en français ou en anglais, selon les mélodies J'ai très mal vécu les attentats du Bataclan. J'étais carrément prostrée.
Et j'ai voulu en faire une chanson, "Lola et Jim" C'est le premier pas vers une forme de guérison chaque fois que je devais monter sur scène, ça me traversait l'esprit. Ce sont des petits bouts de larmes que j'essaye de transformer en verbalisant, pour réparer, se sentir mieux et rire à nouveau.
Je suis poreuse aux injustices.
Vous préférez votre vie d'avant ou celle d'aujourd'hui ?
Quand j'ai connu le succès, jeune et à Bruxelles, je virevoltais dans cette vie avec tout de même une petite ombre au tableau car on me réduisait souvent à mon physique. Je pressentais que cela allait me desservir et ce fut le cas. Les producteurs m'ont collé l'étiquette d'une fille bien roulée. Et comme j'étais une fille bien élevée, je ne ruais pas dans les brancards.Je m'inclinais. J'aurais dû avoir ce courage de risquer, peut-être de perdre. Je suivais la demande. C'était flatteur. J'étais appelée, choisie, mais je ne décidais pas totalement de mon sort.
Je suis aujourd'hui où se niche mon bonheur : sur scène en évoquant l'existence de Billie Holiday et derrière mon ordinateur quand je concocte des bouquins. Aujourd'hui, je suis bien dans ma vie. Mais je reste poreuse aux évènements, aux injustices, aux raccourcis, à cette lente chronique du recul de l'intelligence. Les gens ne savent plus réfléchir, se cultiver. L'éducation a échoué dans de nombreuses couches de notre société et nous en sommes responsables. Mais je suis heureuse quand je reçois les premières épreuves de mon livre* ou les échos de mon disque **.
Propos recueillis par Bernard Meeus.
** Woman (nouveau disque de Viktor Lazlo disponible depuis octobre ICI.
* Les Passagers du siècle (nouveau roman à paraître chez Grasset en janvier 2018).
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#METOO
On ne résiste pas à vous demander à vous questionner : avez -vous été vous aussi harcelée, comme l'ont été tant d'artistes féminines ?
Oui, j'ai posté un message sur facebook à ce sujet Je n'ai jamais été inquiétée jusqu'à mes 44 ans ! J'ai échappé à toutes les tentatives de séduction forcée. Pour moi c'était clair quand je disais non, c'était non de par ma volonté. Il y a 10 ans sun un tournage, j'ai été confrontée à un homme qui multipliait les allusions toujours plus pressantes à mon "rayonnement sexuel". Tous les jours sur le plateau il revenait à la charge. Il était réalisateur. Un jour, en présence de mon compagnon, je me suis effondrée et je me suis confiée à lui : " Tu sais, je crois que je suis victime d'harcellement sexuel." .
J'étais brisée à l'intérieur. J'ai compris qu'on me salissait tous les jours depuis trois semaines. Il m'a dit : "Tu ne retournes pas sur ce tournage, et moi, demain, je vais lui casser la gueule.". Le lendemain, j'ai réglé l'affaire toute seule avec le directeur de production en exigeant des excuses. Ce réalisateur s'est excusé, me disant : "Je suis malade" . Pour moi, ses regrets furent réparateurs. C'est insidieux en fait et difficile à comprendre pour les autres. Le sous-texte est très clair. On se sent souillée. En fait, c'est une agression larvée.
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