" J'ai passé ma vie sans abri, mais avec la sécurité de la création. » Viktor Lazlo a fait le choix de l'aventure.
D'abord la chanson, la comédie, puis l'écriture.
Son premier roman est publié en 2010, La femme qui pleure (éd. Albin Michel, prix Charles Brisset).
Le nouveau roman, Ce qui est pour toi, la rivière ne l'emporte pas, est paru le 25 janvier aux éditions Robert Laffont.
Entre-temps, Viktor Lazlo – patronyme emprunté à un personnage du film Casablanca – a chanté, et joué dans la série Brigade Navarro.
Si vous n'êtes pas né d'hier, Viktor Lazlo, c'est aussi et surtout « Canoë rose », chanson douce-amère, immense succès de 1985, dont le refrain « Fermer les volets et ne plus changer l'eau des fleurs… » est de ces airs que vous ne cessez plus de fredonner sans même vous en rendre compte. L'histoire de sa genèse dit beaucoup de son autrice : elle confie les paroles qu'elle avait écrites en anglais à Boris Bergman, parolier de génie, qui s'en empare et les adapte en français. Les paroles seront signées… Boris Bergman.
La chanson, début de la liberté
À plus de 60 ans aujourd'hui, Viktor Lazlo s'en amuse. Le début de la colère ? Sûrement pas. « Déjà toute petite, je regardais le monde sans en comprendre les assignations et les enfermements, dont j'ai toujours voulu sortir. »
De ces frustrations d'enfance est née l'envie d'écrire. D'échapper à son destin. Cela commencera par la chanson donc, malgré le trac, maladif. « Interpréter des mots, ce n'est pas forcément être à l'aise. J'ai dû apprendre à calmer mes peurs. »
La chanson, c'est tout de même le début de la liberté. Mais à 50 ans, le vrai refuge se concrétise après le deuil d'un compagnon : la publication d'un premier roman, La femme qui pleure.
« J'ai toujours eu le sentiment de l'injustice », insiste-t-elle. De fait, son roman Ce qui est pour toi, la rivière ne l'emporte pas est l'histoire d'une femme à la peau trop claire, enfant d'esclave arrachée à sa mère à l'âge de 7 ans, par un maître qui la violera à 13 ans.
Du fait des hasards du destin, son héroïne, prénommée Olividia, assistera, à Paris, à la première abolition de l'esclavage, le 4 février 1794. « La fatalité du viol est constitutive de la période de l'esclavage, puis de la colonisation. Je suis moi-même issue d'une lignée de femmes abusées », affirme-t-elle avec un emportement qui résonne dans son roman.
En préface de l'ouvrage, elle cite James Baldwin : « Toute notre culture est imprégnée d'imitations de la démarche, de la posture, de la tenue du corps noir en une cooptation vampirique de la vie des Noirs qui en absorbe tout sauf le fardeau. »
« Plus j'écris, plus je m'éloigne de mes personnages », confie l'autrice. Pourtant, c'est bien en Martinique, l'île de naissance de son héroïne Olividia dans Ce qui est pour toi, la rivière ne l'emporte pas, que Viktor Lazlo se voit vieillir.
« Je m'y suis toujours sentie chez moi », dit-elle simplement. Elle y décrit néanmoins les difficultés de cohabitation de deux populations. Descendants d'esclaves et de colons, aux histoires antagonistes, vivent côte à côte dans ce territoire français, « où personne n'arrive à transcender l'histoire ».
C'est là
que, en 2019, elle a créé un festival littéraire, Festival en pays rêvé.
Et c'est là qu'elle voudrait se réfugier « pour ne plus avoir froid ».
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